CRT-FIRT Revista de investigación social y cultura proletaria

CRT-FIRT Revista de investigación social y cultura proletaria
Los CRT-FIRT o Cuadernos Revolucionarios del Trabajo (del Folletín Internacional y Revolucionario del Trabajo), han sido concebidos para publicar los resultados de las constantes investigadoras que acompañan toda una vida, en torno al problema que ellos mismos se plantean en los tiempos que nos han tocado vivir: nuestra capacidad productiva. Y cuando decimos “nuestra” nos referimos tanto a cada uno de nosotros como a la sociedad conformada por todos nosotros, convencidos siempre de que es ésta la capacidad más amenazada por la alienación de la población respecto a sus propios productos emanados de sus fábricas, de sus estudios o de sus talleres. Motivados por la estética, su objetivo es avanzar a través del mito, de la dialéctica y de la crítica materialista, hacia la construcción social a partir de lo socialmente dispersado tras dos siglos de civilización industrial frustrada por una gestión obsoleta ya desde que vio la luz. Los CRT es un proyecto colectivo y personal a un mismo tiempo, de análisis de una nueva realidad surgida de la civilización que todavía espera incluso ser asimilada como tal. Es en consecuencia un mito de la modernidad primitiva basado en la producción misma, en el ensamblaje mecánico de información y en la difusión orgánica. Toda civilización no es otra cosa más que una manera de materialización del pensamiento colectivo, -consciente e inconsciente, lo mismo da-, que impera en una época determinada en la humanidad o en una parte de ella.

miércoles, 17 de febrero de 2016

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sábado, 13 de febrero de 2016

LE COLLAGE:

UN PHÉNOMÈNE HISTORIQUE DU XXe SIÈCLE



2007, Manuel S. Oms
Docteur en Histoire de l´Art










INTRODUCTION

Le collage représente, au-delà de la considération d´une simple technique, le moteur incontournable d´une nouvelle orientation dans l´art du XXe siècle. Il émane même d´un ensemble de bouleversements et de facteurs que l´on ne peut rassembler que très difficilement en une simple histoire, puisqu´avec le collage surgissent dans l´art avec un grand A majuscule, une série de pratiques peu définies appartenant aux arts populaires , mais aussi aux arts appliqués ou encore à ceux de l´industrie et des médias. Dans l´actualité, des objets et des images préexistants appartiennent à l´art,  changeant de façon substancielle le concept de création lequel comprend des actes tels que l´élection, la sélection et, en dernier lieu, la construction ou le montage, ceci en opposition à la conception idéalisée d´une création à partir du néant. L´histoire du collage ne peut être restreinte simplement aux collages en eux-mêmes, si bien que mener à bien la difficile tâche d´établir une frontière entre ce qui est un collage et ce qui ne l´est pas, est devenue une priorité. Ce qui est certain, c´est que le collage a dévoilé beaucoup de caractéristiques propres à la création, lesquelles, par le passé, s´étaient maintenues latentes derrière les principes de la représentation, et qu´il apporte un point de vue nouveau, contemporain de l´art, point de vue dont nous devons prendre conscience.




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RÉSUMÉ DE NOTES SUR MÉTHODOLOGIE ET DIALECTIQUE


Lors d´une session de travail de la Table Ronde Internationale du C.N.R.S. (Centre Nacional de Recherche Scientifique) et dans sa publication Collage et montage au théâtre et dans les autres arts durant les années vingt, on n´a pas choisi directement le collage et le montage comme objets d´études mais, après la recherche de l´élément de liaison qui permettait d´établir une relation entre le théâtre et d´autres registres expressifs, on en a conclu que c´était précisément l´interdisciplinarité du collage ce que l´on recherchait[1]. Il s´agissait, exactement comme l´a proposé Erika Billeter dans la publication citée ci-dessus, non seulement d´une question technique, mais d´un problème artistique nouveau, l´intégration de la réalité dans le monde des tableaux artificiels[2]. Lors du séminaire organisé par Claude Amey et J.P. Olive à l´Université Paris et la MSH Paris Nord en Novembre 2002, il n´en a pas plus été établi que le fragment soit un objet en soi, mais, par contre, il a été reconnu comme étant un élément susceptible de synthétiser la nouvelle situation culturelle, laquelle se caractérise pour avoir su affronter une extraordinaire remise en question des frontières qui séparent l´art de la vie[3].
Le Groupe Mu de sémiotique trouve l´intertextualité du collage dans son supposé langage lorsqu´il définit pas le collage mais sa technique, après avoir relevé un certain nombre d´élements d´oeuvres, d´objets, de messages préexistants et leur intégration postérieure dans une nouvelle création ayant pour but de produire un tout original. Dans ce tout, des ruptures différentes s´y sont manifestées[4], d´autant plus que ce groupe de recherche se centre sur les opérations de sélection et de combinaison des parties constitutives du discours sémiotique[5]. Henri Béhar, lorsqu´il traite la littérature d´avant-garde et qu´il lui applique le principe du collage, affirme que celui-ci ne détruit pas les canaux de transmission, les référents de situation, de contexte, ou encore la substance, la forme du message ou le message lui-même, mais les codes mêmes du langage[6]. On ne peut interpréter son interdisciplinarité dans la transcription ou transposition d´un canal à un autre[7]. La rupture des genres est l´une des caractéristiques intrinsèques du collage, et l´apportation la plus importante du dadaïsme est peut-être celle d´avoir rendu définitive cette confusion, phase fondamentale dans la libération de la poésie des règles du langage[8]. Pour cette raison, la sémiotique est la discipline qui a récemment le plus étudié le collage, bien que le groupe Mu lui-même s´est interrogé sur la possibilité d´une définition définitive[9]. Comme exemple d´approche au collage et au photomontage à partir de la sémiotique, nous pouvons citer les exposés présentés par Yves-Alain Bois –“The Semiology of Cubism”- et par Rosalind Krauss –“The motivation of the Sign”- lors du symposium Picasso et Braque, célébré au Museum of Modern Art de New York en 1989, le tout à partir des théories de Saussure qui établissent l´arbitrariété  du signe[10]. Benjamin H.D. Bucloh, de son côté, attribue à Rosalind Krauss le fait d´avoir appliqué la première la sémiotique de Peirce à l´oeuvre de Duchamp et à celles d´autres artistes appartenant à la même tendance[11]. D´autre part et en ce qui concerne le collage surréaliste, il est absolument nécessaire de rappeler les travaux de Elza Adamowicz (1998). Cependant, c´est peut-être Umberto Ecco qui a été le premier à partir de la sémiotique pour aller vers le collage et les phénomènes plastiques voisins[12].

Or, tout vise à ce que, lorsque l´on eut pris pleine conscience du collage et que l´on fut à même de citer quelques uns des précédents littéraires, de Baudelaire et Rimbaud à Lautréamont, Mallarmé et Jarry, c´est-à-dire, avec la révision du surréalisme, on sut que, plus qu´à conformer un nouveau langage, le collage cherchait la dissolution même du langage. Cette offense aux règles établies, qui commence d´emblée par le champ pictorique, s´était déjà manifestée bien avant dans le domaine littéraire –par exemple, la confrontation venant de Mallarmé, entre l´imprimerie et le journalisme, et la grande littérature[13], ne peut répondre seulement à des raisons artistiques incapables d´expliquer par elles-mêmes l´évolution survenue dans l´Histoire de l´Art. On reproche au langage, aussi bien littéraire que plastique, d´être l´émanation d´un état de séparation qu´engendre une certaine société à une certaine époque, une aliénation qui se fera au détriment de la dialectique fondamentale entre individus et objets. Le langage artistique est attaqué pour être le produit d´un décalage général entre l´expression culturelle et son époque. C´est sur ce phénomène que se situe notre point de vue historique.
Il ne s´agit pas en ce qui concerne le collage et plus particulièrement le ready-made, de différencier ce qui est une oeuvre d´art de ce qui n´en est pas[14]. Mais au contraire, il faut  chercher les points communs qui existent entre l´art et les autres manifestations de la vie, et cela, on le trouve sans aucun doute dans la dialectique sujet-objet qui, jusqu´au XIXe siècle, avait été résolue en suivant les principes aristotéliciens de mimésis et de diégèse. Hegel, en situant ces manifestations esthétiques dans cette dialectique, les reintégra nouvellement au reste des disciplines de la philosophie et aux autres aspects phénoménologiques de la vie, tandis que Kant fit dépendre l´esthétique du jugement, en fonction des principes de plaisir et déplaisir. Pour Hegel, il y a un support universel objectif qui se définit par la dialectique même, d´autant plus que sa philosophie est une philosophie de l´esthétique dont elle dépend: “La philosophie de l´art constitue un anneau nécessaire à l´ensemble de la philosophie”[15], aux côtés de la religion et de la philosophie même, trois niveaux du développement de l´esprit que nous pouvons identifier avec trois niveaux de connaissance: dans le même ordre, l´art est la manifestation sensible de l´Esprit Absolu; la religion, sa manifestation sentimentale et la philosophie, le concept systématique rationnel[16]. Selon cet argument, l´art dans son évolution, cherche la reconciliation de l´idée avec la matière, représentant celle-ci la nécessité du sujet de se dépasser. L´art surgit de cet affrontement, et c´est pourquoi le sujet a besoin de l´objet pour se connaître soi-même (l´homme, étant conscient ressent le besoin de se matérialiser, et, parfois, il trouve dans les objets la façon d´y parvenir: “à travers les objets extérieurs, il tente de se trouver lui-même”[17]). En utilisant la pensée dans ce but, l´idée se manifeste aux sens et constitue la forme qui agit sur la matière objective qui peut très bien s´y attacher de façon symbolique, artificielle ou indépendante. C´est ainsi que l´art constitue une seconde nature, mais qui, contrairement à l´esthétique de Kant, nécessite d´une autonomie de l´objet pour pouvoir entrevoir la base dialectique[18]. La beauté naturelle n´est plus le but de l´esthétique en tant que philosophie de l´art, mais la particularisation sensible du concept, l´accouplement de l´idée et de la forme à travers la matière[19]. L´art ne s´occupera plus que de la beauté qui émane de l´Esprit, alors que l´objet ne sortira de sa finitude et de sa dépendance de lui-même qu´au moment où le sujet le rendra beau, acte grâce auquel –interprété comme abstraction- il perdra sa condition[20].
Pour pouvoir réaliser une relecture du collage après la dématérialisation de l´art que Hegel lui-même annonça comme étant l´objectif de sa dernière période –la forme romantique clôturée par l´anneau suivant correspondant au développement spirituel, la religion-, nous reprendrons ce qui, jusqu´à nos jours est demeuré sur un arrière- plan par un jeu de représentations accordé et objectivé, la récupération de la liberté de l´objet: “on entend par objectivité, la vérité extérieure ou le caractère que présente l´oeuvre d´art, quand une chose est conforme à la réalité, comme nous la trouvons dans la nature, et se présente ainsi à nous avec des traits qui nous sont familiers.”[21]. Juan Eduardo Cirlot coïncide peut-être avec cette libération de la réalité extérieure lorsqu´il commente l´attention que Marcel Duchamp prêta à l´objet: “Au-delà d´une Société protectrice des animaux et des plantes,  Marcel Duchamp se rapprochait de la prévision d”une Société protectrice de l´objet[22].
Les interprétations qui se sont succédé tout au long du XXe siècle, la psychologie de la perception, le formalisme de Greenberg et l´application de la linguistique de Saussure à l´art à travers la sémiotique, le structuralisme et la théorie de l´information, ont en commun la nécessité du subjectivisme pour que se produise un jugement esthétique, une suprématie du sujet qui conduit à la dénaturalisation de la réalité extérieure, et dont les moyens s´imposant à l´objet, sont parvenus à se présenter comme objets par eux-mêmes, alors qu´ils deviennent des instruments dans les analyses postestructuralistes de Barthes, Derrida et Kristeva. Selon Michel Foucault, le processus d´autonomie du langage fait marche arrière jusqu´au XIXe siècle, en raison, entre autres, de la naissance de la grammaire. Il dérive vers la linguistique en tant qu´exercice métalinguistique. En réalité, lorsque la sémiotique se développe durant les années soixante-dix du siècle dernier, le langage est déjà objectivisé. De même que l´a signalé Foucault, au XVIe siècle “le langage n´était pas un système arbitraire; il est déposé dans le monde et il en fait partie à la fois parce que les choses elles-même cachent et manifestent leur énigme comme un langage, et parce que les mots se proposent aux hommes comme des choses qu´il faut déchiffrer. La grande métaphore du livre qu´on ouvre, qu´on épelle et qu´on lit pour connaître la nature, n´est que l´envers visible d´un autre transfert, beaucoup plus profond, qui contraint le langage à résider du côté du monde, parmi les plantes, les herbes, les pierres et les animaux”[23]. C´est à ce moment-là que le langage acquit avant tout la nature d´être écrit, tandis que les sons de la voix deviennent leur traduction précaire. Par contre, c´est au XIXe siècle, lorsque le langage se replie sur lui-même, qu´il “acquiert son épaisseur propre, déploie une histoire, des lois et une objectivité qui n´appartiennent qu´à lui. Il est devenu un objet de la connaissance parmi tant d´autres: à  côté des êtres vivants, à côté des richesses et de la valeur, à côté de l´histoire des événements et des hommes”[24]. D´emblée, il s´impose au sein de la communauté qui le pratique, étant donné sa responsabilité historique dans la connaissance de la réalité: “L´interprétation, au XVIe siècle, allait du monde (choses et textes à la fois) à la Parole Divine qui se déchiffrait en lui; la nôtre, celle en tout cas qui s´est formée au XIXe siècle, va des hommes, de Dieu, des connaissances ou des chimères, aux mots qui les rendent possibles; et ce que cette interprétation découvre, ce n´est pas la souveraineté d´un discours premier, c´est le fait que nous sommes, avant  la moindre de nos paroles, déjà dominés et transis par le langage”[25]. De cette façon les alternatives en ce qui concerne l´objet extérieur, cerné par un acte de connaissance pur de tout mot, se réduisent à deux: “il fallait ou le rendre transparent aux formes de la connaissance ou l´enfoncer dans les contenus de l´inconscient”, d´où le formalisme de la pensée et de la psychanalyse. Ces deux objectifs peuvent même s´imbriquer sur un terrain commun, celui du structuralisme et de la phénoménologie, par exemple dans la “tentative pour mettre à jour par exemple les formes pures, lesquelles, avant tout contenu, s´imposent à notre inconscient; ou encore effort pour faire venir jusqu´à notre discours le sol d´expérience, le sens d´être, l´horizon vécu de toutes nos connaissances”[26].

De même que Marshall MacLuhan détermine l´objectivation moderne du langage à partir de l´imprimerie, Jean Clair situe cette réification à la fin du XVIIIe siècle, au moment même de la naissance de la linguistique (avec les travaux de J.G.Herder et Johann G. Hamann) dans le cadre du premier romantisme allemand et de ses recherches sur l´identité nationale à partir des caractères de la langue (Johann Gottlieb Fichte). Il s´agissait de rechercher une origine naturelle au langage, un caractère organique impropre en raison de son idiosyncrasie constructive. Cette confusion coïncide dans le temps avec les débuts de l´industrie, laquelle présente ses produits de fabrication inconnus du consommateur comme s´ils existaient depuis l´éternité dans son aspiration à imiter le comportement organique des formes naturelles. Plus encore si l´on tient compte que ces recherches de type romantique ont comme précédent celles de Giambattista Vico qui, un siècle plus tôt, avait déjà tenté de trouver l´origine des mots dans les onomatopées et dans les monosyllabes, d´où l´on peut conclure leur caractère purement émotionnel. Lorsque Jean Clair différencie dans le langage la fonction communicative de l´expressive, et  découvre l´abstraction de l´expression  dans les conclusions de ces premiers pas sur le chemin de la linguistique, nous, nous entendons que la fonction expressive est la manifestation de la parole même, qui court de façon parallèle à la fonction du collage et de l´assemblage qui consiste à manifester des objets qui se présentent à nous totalement opaques dans leur nouvelle nature. Ainsi Clair pense-t-il que c´est pour cette raison que l´expressionisme fut le seul langage du XXe siècle qui s´est maintenu dans le temps, Nous pensons que cette fonction expressive est dans le fond manifestante et, par conséquent, qu´elle se trouve à la base du reste des ismes. Par le biais de cette fonction uniquement révélatrice du mot et de l´objet, propre à la pensée romantique allemande, naît comme réponse la phénoménologie de Hegel, basée sur les relations dialectiques entre sujet et objet. Il n´y aura plus de valeurs universelles, mais ce n´est pas non plus pour cette raison qu´elles doivent être substituées  par d´autres subjectives mais inconnues, impénétrables[27].

C´est ainsi qu´à partir du langage, nous pouvons comprendre en partie le déclin de la pensée classique au XIXe siècle: la perte du verbe “être”, trait d´union entre les mots mais aussi entre la parole et la pensée, et en même temps, limite du langage même, dont l´indépendance ne se résout pas de façon complète et n´existe que de forme fragmentée, conséquence dérivée de la perte de la représentation. Les mots nous parviennent dispersés: “pour les philologues, les mots sont comme tant d´autres objets constitués et déposés dans l´histoire”[28]. En ayant connaissance à travers Saussure de la nature psychologique du langage, et par extension, du signe en général, dans son usage et dans sa formation, il ne constitue pas une synthèse de la dialectique sujet-objet, mais la substitution de l´objet par l´action du sujet. Hegel a prévenu de ce danger en faisant une référence à Kant: “...et si, d´un côté, l´intuition et le sentiment reçoivent un caractère de généralité qui leur permet de participer de l´esprit,  la pensée, d´un autre côté,  ne renonce pas uniquement à l´hospitalité envers la Nature (...) même cette conciliation totale en apparence est, en fin de compte, seulement subjective, c´est-à-dire, réalisée par le sujet, et n´existe qu´en vertu de son jugement”[29]. Cependant le langage, en étant réifié, a également perdu ses points de référence subjectifs. Il est resté en suspens en no man´s land, il s´agit d´une abstraction matérialisée faite pour signifier et qui a perdu sa raison d´être. D´où son résultat fragmentaire, qui curieusement va coïncider avec le tournant pris par la perception des objets à partir de la Révolution Industrielle, la marchandise et la genèse d´une société de consommation. Ainsi en est-il que Mallarmé, en voulant atteindre l´”Absolu”, désira affirmer la solidité du mot en reconstruisant l´unité du langage, en réunissant toutes les propositions possibles en un seul livre[30]. Voilà la raison pour laquelle son art tente d´être autonome, pur. Comme dans le collage (si nous le considérons comme oeuvre d´art), nous découvrons le rapport du langage avec le monde objectif extérieur dans ses fractures, étant donné que ce sont elles qui lui octroient la condition d´objet. Grâce à elles, le texte et l´oeuvre d´art sont un objet de plus, et pour pouvoir nier ce fait, c´est le hasard qui doit être combattu.

Dans la discussion autour du collage, nous ne pouvons plus parler d´oeuvre d´art. Nous ne pouvons même pas nous demander ce qu´il est, à quelle catégorie il  participe. Son dilemme implique un bouleversement dans la perception survenu au XIXe siècle et matérialisé culturellement durant le XXe. Et pas seulement du langage, mais aussi de tous les objets de la réalité extérieure.






LE COLLAGE EN TANT QUE PHÉNOMÈNE HISTORIQUE


Si nous comprenons l´art comme étant la rencontre de deux catégories opposées, la matière et la forme, l´attention aussi bien traditionnelle que ses dérivés actuels, a eu tendance à se concentrer sur la forme, pour avoir compris que c´est là que se situe l´action de l´artiste, le côté subjectif de sa création. La prédominance de techniques bien définies jusqu´au XXe –en peinture, surtout la peinture à l´huile sur toile, l´aquarelle, ect.-, a aussi conditionné considérablement ce point de vue. Cependant, la considération de la matière est même nécessaire pour établir un parallélisme entre le langage et les arts plastiques, en même temps qu´il faut comprendre les mots, les phonèmes et leurs codes comme étant des corrélatifs de la matière employée dans les arts plastiques, laquelle jusqu´au XIXe siècle était très concrète et dont la manipulation était le fruit d´une formation artisanale au début et, par la suite, académique.
Non seulement la comparaison des arts plastiques avec le langage, mais aussi la psychologie a favorisé la maîtrise de la forme, vu que ce qui est à la base du langage c´est la psychologie exactement comme l´expose Saussure. La prépondérance du kantisme dans les courants d´interprétation trouble la dialectique sujet-objet, de même que celle de la forme-idée dérivée. Ainsi cachée, la matière demeure reléguée et oubliée sans possibilité de juger et d´approfondir les contributions de l´art contemporain dans toute leur dimension car, en marge de l´abstraction, de la perte formelle de la représentation, l´introduction de nouveaux matériaux ont facilité la connection de l´oeuvre avec l´extérieur et sa dissolution postérieure. Même, l´abstraction portée à son dernier degré (par exemple le tissu monochrome[31]), a converti le tableau  en un objet de plus qui s´ajoute à la réalité objective, perdant sa fiction potentielle en faisant de sa superficie une opacité qui empêche la vision de pénétrer dans quelque espace fictif (les monochromes de Rodchenko présentés en 1921). Tout cela joint à l´importance du geste, qui conçoit la peinture sans commencement ni fin, comme un essai, la matérialisation d´un exercice qui se prolonge dans une série de tableaux qui perdent une valeur per se. La primatie de la forme n´est pas du ressort de la sémiotique de l´art, ni de la psychologie de la forme ou encore du formalisme en général; elle remonte à l´histoire des styles de Wölfflin et aux recherches symboliques et iconographiques de Gombrich et Panofsky. Et ce n´est pas tout: la critique et l´histoire, en ignorant l´importance de la matière en marge de sa manipulation, en systématisant les ressources matérielles en un langage- cela souvent en raison de la propre activité de l´artiste qui répète les moyens découverts par lui, jusqu´à ce qu´il en fasse une technique-, font qu´on rejette l´élection comme acte créatif.

            Nous pourrions dire que, déjà, dans le matériel se trouve un contenu d´ordre discursif. En revanche, nous allons beaucoup plus loin si nous affirmons que dans le matériel, avec ses qualités particulières comme l´ont travaillé les constructivistes russes, le premier pas constructif est déjà implicite. Mais ce n´est que très récemment qu´on a élaboré une première histoire matérielle de l´art contemporain proprement dit de la main de Florence de Mèredieu: Histoire matérielle et immatérielle de l´art moderne. Évidemment, ses travaux s´inscrivent dans un cadre phénoménologique qui a ses origines dans l´esthétique de Hegel[32]. Cependant, cette récupération –comme le souligne l´historienne- ne signifie pas s´interroger uniquement sur la matière, laquelle ne constitue que l´un des deux pôles du conflit qui se tient dans une oeuvre d´art, vu que toutes deux –matière et forme- sont implicites dans le collage. Fait curieux, le collage ne s´inclut pas dans cette étude qui suppose une nouvelle rencontre presque taxonomique des variantes matérielles abordées pendant le XXe siècle. Celles-ci seront réunies en bloc selon les caractéristiques des matières étudiées. Le papier-collé et le photomontage se situent dans le même groupe pour avoir le papier comme support. Par contre, on ne peut pas envisager le collage –d´après les acceptions données par les artistes eux-mêmes (surtout par Max Ernst[33])-  sur un support déterminé. De cela résulte que le collage se dilue dans l´argumentation du livre de Florence Mèredieu, dans l´adoption de la part des artistes des nouvelles possibilités matérielles en tant qu´extra picturales. C´est pour cela que le collage, sans être inséré dans l´index de l´art contemporain, est sollicité par son auteure à plusieurs reprises pour sa dimension hétérogène et matérielle, c´est-à-dire, parce qu´il implique par lui-même l´éveil des possibilités du matériel, capable d´apporter lui seul un signifié. C´est à travers le collage que cette auteure explique l´essor du papier et des matériaux mixtes d´assemblage et la rupture des genres[34]. Un précédent de cette histoire matérielle de l´art contemporain, bien que de nature différente –une étude beaucoup moins académique-, c´est le livre du fondateur du lettrisme Isidore Isou De l´impressionisme au lettrisme. L´évolution des moyens de réalisation de la peinture moderne. L´auteur trace une histoire approximative des matériaux employés depuis l´impressionisme –en soulignant la grande révolution en 1912 avec les premiers papiers-collés- cubistes-, afin de vanter la contribution “meta-esthétique” de son mouvement lettriste. Il définit deux niveaux dans ses travaux: la forme et le support –tous deux étant impliqués d´une certaine facon[35]. Le collage y  acquiert  un protagonisme crucial tout au long de son argumentation, laquelle s´applique à étudier la libération des possibilités matérielles et mécaniques du support dans le cadre traditionnel de l´Histoire de l´art. De cette manière il dévoile les limitations d´André Breton et de Louis Aragon qui considèrent le collage à partir de la peinture bien que celui-ci  en représente une négation, ce qui les empêche d´apprécier ses contributions au-delà de la substitution du trompe-l´oeil par des objets réels[36]. Ces liders surréalistes se sont intéressés excessivement  aux possibilités d´ouverture sociale de la plastique pour avancer vers la poésie “faite pour tous” contrairement au professionnalisme,  principe qui commande le reste des arts.

            C´est ici que nous nous posons la question suivante: le collage fait-il partie de l´histoire matérielle de l´art contemporain? Si nous répondions carrément par un oui, nous couperions la dialectique forme-matière. S´il est vrai que la contribution du collage est surtout d´ordre matériel puisqu´il l´étend à toutes sortes de substances et d´objets possibles, c´est ce fait uniquement qui constitue une base qui nécessite d´être confrontée à la manipulation que subissent ensuite ces matériaux aux mains des créateurs. En vérité, à partir de cette ouverture des limites, l´artiste pourra créer ses propres matériaux, lesquels, d´autre part, vont d´une certaine façon l´identifier. Ces matériaux pourront aussi simplement être choisis et découverts. Cependant, avec le concept de collage, on peut prendre un matériau qui soit déjà intégralement constitué formellement (un ready-made ou un objet naturel) même avec sa propre iconographie préexistante (une photographie ou une illustration). De cette manière, le collage se déplace du matériau à l´iconographie. Les images visibles aussi bien du collage romancé de Ernst que celui d´un photomontage, voire dans les combine-painting de Rauschenberg, n´auront logiquement pas un fonctionnement identique que dans la peinture illusionniste précédente, encore que cela n´empêche pas sa valoration plastique et iconographique. Le collage suppose l´ouverture à n´importe quel matériau et composants pourvu qu´ils se trouvent confrontés dans l´oeuvre, autant pour être différents (du papier collé cubiste jusqu´au combine-painting) que pour contenir des images qui ne se corespondent pas logiquement (collage de Max Ernst) ou encore pour opposer de manière irraisonnée des formes différentes (photomontages dadaïstes). Il ne s´agit pas seulement d´une question matérielle (on ne se limite pas non plus à ce qui est de la forme et à la négation de l´image (comme l´ont cru Clément Greenberg et ses successeurs), parce que le collage récupère les possibilités matérielles en tant que contenu qui lui sont propres dans tous les domaines possibles (formel, figuratif, discursif, poétique, sémiotique, narratif, symbolique... et surtout constructif), après avoir connu celles-ci l´oubli à partir de la systématisation des techniques dans l´artisanat et plus tard dans l´Académie. C´est ainsi que le collage est capable de rompre le concept technique. L´oeuvre artistique se dissout essentiellement par une rupture des barrières, maintenant que son concept est susceptible d´être appliqué à la réalité même.
            De cette dialectique entre matière et forme, on en déduit une dualité critique: l´idéalisme objectif de Hegel et le matérialisme historique de Marx. Comme l´a si bien signalé Florence de Mèredieu, l´histoire matérielle de l´art concerne aussi bien  la “réalité physique concrète” de l´idéalisme objectif que les “infrastructuress socio-économiques” du matérialisme historique. Ces deux systèmes philosophiques, dans une certaine mesure, défendent un point de vue historique, du moins évolutif, si bien qu´avec le matérialisme historique, l´histoire finit par intégrer de façon intrinsèque les phénomènes. Ce point de départ permet d´analyser le travail de ces artistes qui se sont maintenus dans la tradition dialectique et ceux qui ne s´y sont pas maintenus, c´est-à-dire, ceux qui ont cherché la libération du concept (minimalisme et art conceptuel, par exemple) comme ceux qui poursuivent la libération de l´esprit (Malevitch, le Surréalisme, Klein, Beuys...)[37], à condition toujours que nous partions de l´oeuvre même afin de dévoiler les facteurs historiques qui participent de sa création.







NOUVELLE CONCEPTION DE LA RÉALITÉ

            Selon l´évolution esthétique de Hegel, trois grandes époques se succèdent: la symbolique –avec l´hégémonie des arts orientaux-, la classique –caractérisée par l´équilibre entre l´idée et sa matérialisation sensible-, et la romantique – déterminée par le triomphe du christianisme et le dépassement spirituel. Le critère distinctif est le degré de libération que ressent l´esprit lors d´une première réaction face à l´objet qui lui est étrange. Pour que sujet et objet se libèrent de leur isolement, il faut que tous deux s´engagent dans une certaine objectivation du sujet pour que l´objet acquière une subjectivité. De cette façon, ils ne vivent pas enfermés en eux-mêmes mais pour eux-mêmes. Ce concept d´étrangeté qui pour Hegel est l´origine de la culture[38] et qui peut également expliquer la première approche de sélection du créateur à l´objet préexistant pour l´intégrer dans une structure nouvelle –le collage-, est en soi la base de tout phénomène, c´est-à-dire, qu’il est a-historique. L´avancée seule dans la libération de l´esprit permettra d´établir une évolution laquelle, après l´époque romantique, atteint la polémyque “fin de l´art”, annoncée par Hegel. Celle-ci, dans notre exposé, est comprise comme étant le dépassement de la sensibilité artistique qui se présente alors comme manifestation sentimentale de l´Esprit, propre à la religion et à la rationalité systématique philosophique-scientifique, suivant l’ordre des anneaux consécutifs de la philosophie établie par ce philosophe. Par conséquent, nous pourrions justifier à partir de son esthétique, la dématérialisation qu´a subie l´oeuvre d´art après la Deuxième Guerre Mondiale, allant de l´objectivité au concept, en passant par le langage expressionniste abstrait malgré les divergences existantes. En effet, ce détachement de la matière, l´art l´avait déjà expérimenté à la fin de l´époque romantique hégélienne lorsqu´il élève la poésie à son hégémonie au-delà de tout matériel possible –même de la parole écrite ou parlée-, en réunissant le reste des arts dans son universalité car elle est le meilleur chemin pour la manifestation de l´Esprit[39]. Avec la poésie, le symbole se fait signe: “La poésie est l´art général le plus compréhensif, celui qui a réussi à s´élever jusqu´à la plus haute spiritualité. Dans la poésie, l´esprit est libre en soi, il s´est séparé des matériaux sensibles pour en faire des signes destinés à l´exprimer. Le signe n´est pas ici un symbole, mais queque chose de complètement indifférent et sans valeur, sur lequel l´esprit exerce un pouvoir de détermination”[40]. Julia Kristeva distingue encore le symbole du signe dans un cadre historique, lorsque se produit le passage de l´un à l´autre à la fin du Moyen Âge, en fonction du pouvoir de réification du symbole vis-à-vis des trascendances universelles, tandis que le signe fait référence à des unités plus concrètes - bien que tous deux partagent un caractère dualiste et un pouvoir hiérarchisant. Le signe projetterait les qualités du symbole sur une réalité concrète. Alors que les symboles s´enchaînent alternativement, pouvant s´exclure entre eux ou ne pouvant simplement atteindre la conjonction, le signe s´enchaîne de façon non alternative[41]. À ce propos, nous devons dire que si nous réussissons à considérer comme signes les fragments d´un collage, nous pourrions souder les fractures qui en font un collage proprement dit, pour cela, nous devrions libérer le signe de sa fonction signifiante, exactement comme l´ont suggéré les dernières prises de position de la sémiotique dans les années soixante et soixante-dix.
            Avec ce dépassement d´ordre spirituel, la réalité objective extérieure s´est également libérée: elle verra naître sa représentation dans la poésie bourgeoise et dans la peinture de type hollandais, c´est-à-dire, dans le cadre d´une société bourgeoise protocapitaliste. Face à cette représentation de la réalité, Hegel se demande directement si nous sommes en présence d´un fait artistique proprement dit si, pour pouvoir répondre, on n´a tenu compte que des habiletés techniques de l´artiste. Ce type de productions dont les critères mimétiques ont prévalu jusqu´au XXe siècle et qui reproduit l´étrangeté entre sujet et objet, sont le reflet peut-être de notre méconnaissance technique d´une réalité qui nous est étrangère précisément parce qu´elle est re-présentée. Voilà donc la situation générale dans laquelle se trouvait le spectateur du début du siècle dernier, au moment où le statut atteint par la peinture était corrélatif aux biens de consommation que la Révolution Industrielle avait mis en circulation. Si l´aliénation chez Hegel est phénoménologique malgré sa perspective historique, celle de Marx est historique en soi-même[42]. L´étrangeté de l´objet va depuis sa propre production –pour laquelle la main d´oeuvre touche un salaire qui ne correspond pas à la valeur réelle de ce qu´il .produit- jusqu´à son achat, dans lequel à la valeur d´utilisation s´ajoute la valeur de change qui agit comme un masque, une abstraction arbitraire en dernière instance qui recouvre la véritable réalité de l´objet, en commençant par le fait que le passage d´une valeur à une autre signifie le passage de la qualité à la quantité[43]. De ce fait, on en déduit la capacité de l´objet manufacturé dès que l´on perd son référent d´usage, de contenir matérialisée et cachée une quantité déterminée de travail calculée en heures[44]. À ce mystère, il faut ajouter les matériaux inédits pour la population consommatrice et l´intervention de la machine dans leur fabrication[45].

            Le composant social de l´objet –la solidification d´un processus humain de fabrication- est  le moyen par lequel celui-ci entre dans un réseau universel de valeurs de change qui le rendent opaque une fois adoptée la forme d´une marchandise, laquelle est énigmatique et par conséquent, fétichiste. L´objet se referme sur lui-même pour être perçu cette fois non plus avec un caractère social mais naturel, et par conséquent, l´ordre social se présentera également comme naturel[46]. Et à l´envers, le sujet peut commencer à le déchiffrer comme s´il s´agissait d´un rébus, reconstruire à l´aveuglette le processus de travail qu´il laisse après lui, son contenu social[47]. Les marchandises répondent ainsi: “La valeur utilitaire intéresse peut-être les hommes. Mais nous, en tant qu´objets, ça ne nous  inquiète pas. Ce qui nous intéresse objectivement, c´est notre valeur. Notre propre circulation comme choses-marchandises le prouve. Nous parlons les unes des autres comme valeurs de change”[48]. Ne pourrait-il pas exister un parallélisme entre cette superposition de valeurs et les chaînes syntagmatiques du langage qui prennent le signe de manière arbitraire, c´est-à- dire, sans qu´il maintienne une relation quelconque avec son référent? En objectivant le signifiant, nous dévoilons ses relations idéologiques, exactement comme nous avons commencé à reconstruire les valeurs sociales de la chose-marchandise une fois que nous avons pris conscience de son opacité. Avant de franchir ce premier pas, l´objet de production capitaliste est, pour nous, aussi naturel qu´un caillou ou la feuille morte d´un arbre.

Françoise Monnin a attribué un rôle important à la Révolution Industrielle dans la naissance du collage contemporain. Elle a  su voir l´importance de la mise en place en 1913 de la première chaîne de montage dans les usines Ford de Détroit[49]. Mais ce qui est curieux c´est qu´autant Florence de Mèredieu[50] que Pierre Daix[51], que Lewis Mumford[52] et qu´Octavio Paz[53], voient dans l´industrie d´un côté, et dans la découverte des arts primitifs de l´autre, les deux détonateurs fondamentaux qui font démarrer l´art contemporain. Les objets exotiques qui proviennent des colonies de l´impérialisme industriel font leur apparition revêtus d´une aura étrange et pénètrent sur le marché comme un produit quelconque. Mais il existe encore une autre convergence entre l´industrie et le primitivisme[54]: malgré les progrès scientifiques et techniques de la société, les objets sont à nouveau étrangers à l´individu comme le furent les objets naturels pour l´homme primitif[55] . La façon de réagir face à ces objets, c´est le bricolage de Lévi-Strauss, la logique taxonomique de la pensée mythique qui part du concret pour le dévier vers une nouvelle fonction: il y a quelque chose de paradoxal dans l´idée d´une logique dont les termes consistent à des restes et des morceaux, vestiges de processus psychologiques ou historiques et, en tant que tels, dépourvus de nécessité[56].
            Non seulement à cause de l´influence que put exercer l´art nègre chez Picasso[57], Vlaminck ou Matisse, mais aussi en raison de l´opacité de l´objet, valeur corrélative à  la première appréciation de cet art comme marchandise –la négation de la perspective fictive qui fait de l´oeuvre un objet-, et à la peinture polychromée de Rodchenko et à l´importance de la faktura pour les constructivistes russes. Les objets primitifs se présentent étrangers, d´origine inconnue, ce sont des stimulants pour la curiosité[58] jusqu´à ce que Carl Einstein réclame l´assimilation compréhensive de l´art nègre[59]. De toute façon, l´art considéré comme primitif ne cessera d´inspirer de nouveaux contenus pour une réalité infranchissable tout au long du XXe siècle.
            Ce fait prouve bien que, tout au long de l´histoire, il y a eu une substitution  progressive de l´aliénation naturelle par l´aliénation sociale[60]. À partir du XXe siècle, les marchandises se présentent comme si elles étaient naturelles, tandis que les tableaux montrent de manière fictive une réalité imitée[61]. Le spectateur, pour prendre conscience de sa situation devra nier la fiction et assimiler l´opacité de l´oeuvre essentielle bien que latente. Il existe la possibilité d´une réconciliation de l´aliénation phénoménologique hégélienne du sujet dans l´objet, avec l´aliénation de Marx qui se caractérise pour être de fondement historique et pour être basée sur le fétichisme de la marchandise: cette dernière reproduit de façon illusoire la première pour la substituer sous les mêmes principes mimétiques qu´Aristote appliqua à la poétique, la valeur de change représente la valeur d´usage au début de son histoire[62], car la marchandise était destinée à masquer la nature même[63]. Pour cette raison la fiction de la peinture est l´explication de la marchandise et de l´organisation sociale et, lorsque le constructivisme et le dadaïsme portent atteinte à la mimesis aristotélicienne, nous ne pouvons plus restreindre cette attaque au domaine de l´art qui tout simplement souffre d´un décalage vis-à-vis des moyens de production industriels qui se sont substitués à l´atelier qui les avait précédés (cadre de travail limité maintenant au peintre et au sculpteur), mais nous devons l´étendre à toutes les contradictions bourgeoises au sens le plus large.
            C´est au sein de cette nouvelle inaccessibilité à la réalité que surgit un nouvel artiste[64], lequel sera seulement défini pour son indifférence envers la professionnalité du milieu social. C´est celui qui déambule dans les rues gouvernées par la coupure des vitrines de divers commerces et de panneaux publicitaires, celui qui erre à travers les marchandises, qui est illustré par la notion offerte par Walter Benjamin du nouveau statut que Baudelaire léga au poète[65]: “Le flâneur, c´est celui qui est abandonné  dans la foule. Et c´est ainsi  qu´il se retrouve dans la même situation que les marchandises(...) L´ivresse à laquelle se livre le flâneur, c´est celle de la marchandise dont se saisit le rugissant courant des acheteurs”[66]. Comme, en raison de leur élaboration et de leur usage, l´identification du sujet avec les objets n´est plus possible (Erich Fromm, 2000: 119-120. Plus tard, cet auteur différencie la propriété fonctionnelle de la mort et non fonctionnelle, étant la fonctionnelle compatible avec l´annulation marxiste de la propriété privée. Erich  Fromm, 2000: 125-132) [67], le flâneur trouvera dans l´opacité de la marchandise la manifestation de lui-même, phénomène que Duchamp conceptualisera dans “la beauté de l´indifférence”. Le collage va convertir –en essayant d´empêcher la séparation au sens le plus large- cet état d´étrangeté absolue en un nouveau principe d´identité conciliatrice entre l´individu et la réalité objective transformée par l´abstraction économique du capitalisme. On pourra imputer à cette hypothèse le manque de considération envers l´usage des objets naturels, présents dans beaucoup de processus créatifs depuis les avant-garde historiques, mais l´étrangeté s´étend par simple réflexe de perception. De la même manière que le bourgeois ne peut voir dans les membres de sa famille qu´une valeur de change[68], l´homme contemporain croira que la nature lui offre une marchandise, parce que, dans le fond, il ne pourra pas la distinguer de l´industrie, et que, d´autre part, les langages taxonomiques auxquels nous avons recours pour pouvoir identifier les individualités naturelles et les réunir dans des familles et des espèces, ne sont déjà plus si lointains que n´importe quel objet manufacturé que nous puissions acquérir dans un établissement.
La marchandise gouvernée par le quantitatif de la valeur de change qui fait qu´un objet dépende d´un autre, ne peut acquérir sa singularité – l´aura benjaminienne de la réalité, son identité- que par l´exclusivité de la rencontre hasardeuse des vitrines des passages[69]. C´est à ce point culminant de la rencontre unique résumée par un “jamais” –comme spécifie Benjamin-, où fluit l´identité perdue par l´étrangeté, où surgit “un amour pas tant à première vue qu´à dernière vue”[70]. L´identité perdue de l´objet dans son élaboration et usage, puisqu´il ne répond plus à un but authentique mais artificiel –prétexte du marché et intérêt crée-, est substituée par les rencontres que projette l´identité du sujet: “dans le fond, c´est cette conscience du moi celle qu´il prête à la marchandise qui court les rues”[71]. Baudelaire même reconnaìt cette fusion de l´identité avec ce qui est observé:

“Le poète jouit du privilège de pouvoir, à son gré, être lui-même ou un autre. Comme ces âmes qui déambulent à la recherche d´un corps, il pénètre, lorsqu´il le désire, dans le personnage de n´importe qui. Il n´y a que pour lui que tout est vacant.
Le promeneur solitaire et songeur obtient une ivresse singulière de cette communication universelle (...)
Ce que les hommes nomment amour est bien petit, bien restreint et bien faible, comparé à cette ineffable orgie, à cette sainte prostitution de l´âme qui se donne tout entière, poésie et charité, à l´imprévu qui se montre, à l´inconnu qui passe” [72]

En ce qui concerne l´art en particulier: “Qu´est-ce l´art pur d´après la conception moderne? C´est créer une magie suggestive qui contienne à la fois l´objet et le sujet, le monde extérieur de l´artiste et l´artiste lui même”[73]
Bien qu´avec des différences et même dans certaines occasions de claires oppositions, Rimbaud partage cependant avec ce dernier, cette identification du poète avec les rencontres expérimentées à l´extérieur:

“Depuis longtemps je me vantais de posséder tous les paysages possibles, et trouvais dérisoire les célébrités de la peinture et de la poésie moderne.
J´aimais les peintures idiotes, dessus de portes, décors, toiles de saltimbanques, enseignes, enluminures populaires; la littérature demodée, latin d´église, livres érotiques sans orthographe, romans de nos aïeules, les contes de fées, petits livres de l´enfance, opéras vieux, refrains niais, rythmes naïfs.”[74]

Baudelaire ne partage peut-être pas l´abstraction de Rimbaud, mais agit certes au niveau qui correspond à l´objet. Les mots sont des concepts qui dans l´assemblage syntactique atteignent leur révélation en tant qu´objets; c´est pour cela que ce poète est l´un des référents du degré zéro de l´écriture de Barthes[75]. Au moyen de cette abstraction, Rimbaud réussit à entrer en possession d´un langage propre à la poésie (synesthésie entre couleur et lettres dans Voyelles) qui n´a aucune raison de se restreindre au mot, mais qui est susceptible d´être appliqué aux arts restants, exactement comme l´ont pratiqué beaucoup de ses adeptes du XXe siècle. Cependant, ce langage peut être même élargi à la réalité, puisque son idiosyncrasie réside dans le fait qu´elle se situe en marge de la logique[76]. La poésie devient, indirectement comme dans le cas de Baudelaire, un moyen de connaissance de la réalité contradictoire, implicite déjà dans l´esthétique de Hegel et dans la philosophie de Novalis[77], encore que, désormais, il lui faut comme requis poétique –comme cela se produit dans l´adoption de la dialectique par le matérialisme historique-  la perte de l´idéalisme[78].
            Bien connue la maxime “Je est un autre” présent dans les Lettres dites du voyant de Rimbaud[79], par laquelle les surréalistes Marcel Jean et Arpad Mezei saisirent un dédoublement du moi qui exige une synthèse qu´il trouvera dans la réalité quotidienne grâce à la transmutation que l´alchimie verbale facilite[80]. En dernière instance, cette identification avec l´extérieur est aussi le but convoité par Baudelaire. Il s´agit d´une alternative à la fonction servile du langage comme représentation de la nature, et qui, maintenant, s´assimile pour s´incarner en elle[81]. Cette possibilité évolue latente dans quelques sources littéraires très concrètes: la poésie de Lautréamont lorsqu´il définit ce qui est beau comme une rencontre fortuite, sur une table de dissection, d´une machine à coudre et d´un parapluie[82], dans les dérives du Docteur Faustroll de Jarry pour un Paris converti en marécages[83], dans les tentatives pour atteindre l´absolu de Mallarmé et dans l´esthétique de la surprise de l´esprit moderne d´Apollinaire[84], jusqu´à  la dissolution de l´identité dans les collages de Max Ernst[85]. Un nouveau concept de la poésie prend naissance qui n´implique pas l´articulation d´un langage sous des normes qui tendent à atteindre une plus grande beauté, comme le signale Barthes, mais une nature contradictoire dont la première dialectique siège entre le sujet et l´objet[86], faisant ainsi de l´autoportrait son sujet principal. Ce n´est plus un problème qui touche seulement quelques poètes concrets; c´est devenu une question qui les concerne tous. Avant Isidore Ducasse, Hegel avait déjà annonçé la fin de l´art avec la libération de l´Esprit, et il avait même prédit la fin de la dépendance de certaines techniques. Avec cela, il prophétisa l´art à son niveau le plus élevé, la poésie, comme quelque chose d´accessible à tout le monde en fonction de son “talent personnel”[87]. Cette idée fut développée par la suite par Marx et Engels, mais d´un point de vue matérialiste, lorsqu´il définirent la démocratisation de l´art comme l´un des symptômes de la société communiste[88]. Cependant, ce qui résulte intéressant dans cette dissolution de l´artiste, comme le souligne Marx lui-même, c´est que c´est la conséquence de la disparition de la division du travail qui implique l´écroulement de l´identification poésie-art-travail qui est corrélatif à la libération de la dépendance technique et de la possibilité de considérer poétiquement tous les aspects qui se détachent de la réalité même: Novalis, à partir des principes de sélection, combinaison et rythme comme méthode, unifie les différentes manifestations artistiques, de la musique jusqu´à la peinture et la poésie, lesquelles sont maintenues à l´écart de la nature par l´action du sujet. La poésie, maintenant hégémonique car elle est la plus effective à l´heure de libérer l´esprit du sensible –selon Hegel-, peut se révéler dans n´importe quel domaine de la réalité, et d´après Novalis, dans n´importe quel genre de livres et traités, même dans le domaine des affaires[89], comme par la suite l´affirmeront Tzara et Paul Dermée. Face à la beauté des lois rigides qui ont gouverné l´esthétique du passé, maintenant l´objectif ultime est la manifestation de soi-même, objectif considéré comme étant une nécessité morale parce que cette position dérive de la morale même, la lutte contre les limites naturelles, la maîtrise de ce qui est naturel[90]et parce que dans la société industrielle elle se transforme en lutte contre les conditions sociales qui présentent les objets manufacturés comme étant objets naturels. Quand le sujet se révèle à travers la résolution poétique de la dialectique, l´objet se manifeste, niant de cette manière que la représentation de la réalité soit le but ultime de l´art[91], parce que la synthèse s´ajoute à la nature préexistante[92] pour inviter un nouveau sujet à une nouvelle expérience esthétique. Tout semble coïncider dans le cadre des contradictions du marché industriel, car la maxime de Marx qui dit que le monde ne doit pas être expliqué mais construit[93], surgit d´une critique à la représentation et à la conséquente séparation implicite dans son analyse de la marchandise, laquelle cache la valeur d´usage des objets. Souvenons-nous comment le groupe de la revue Documents –dirigée par Georges Bataille- réclamait un matérialisme radical qui récupère la valeur d´usage des objets avec leurs fonctions fétichistes et les mythes de l´art primitif, une tâche poursuivie par la suite par le structuralisme de Lévi-Strauss qui met en relation la nécessité taxonomique et la différenciation entre des groupes humains et d´autres à partir des détournements appropiés de diverses espèces naturelles (le totémisme comme le bricolage)[94].

Nous avons analysé le processus historique qui changea le statut de l´objet dans le cadre de la Révolution Industrielle, un objet défini maintenant pour son opacité et qui ne peut être choisi ni sélectionné que pour faire partie d´une nouvelle esthétique qui s´élève face à l´imitation de la réalité qui dominait jusqu´alors. Elle marque la fin de l´art que Hegel interprète comme libération de l´esprit. Cette façon de faire sera finalement reléguée à la condition de simple habileté technique. La séparation qu´exerce un art imitatif est parallèle à la séparation entre la marchandise et les objets que celle-ci met en circulation. De ce fait, les deux étrangetés se dressent face à face lorsque survient l´essor de l´hégémonie bourgeoise. La réaction du collage à cette situation sera  d´essayer de contourner cette fissure en introduisant dans les oeuvres d´art des objets qui antérieurement n´étaient pas considérés artistiques[95], objets qui appartiennent à la réalité quotidienne et qui possèdent donc une identification sociale plus importante que la peinture appliquée dans les ateliers. Ce processus d´ouverture en marge du collage artistique proprement dit, va de la peinture en plein air des réalistes et impressionistes –parce qu´il sortent à l´extérieur pour peindre le sujet directement-, jusqu´à la récupération de papiers et d´emballages pour l´élaboration d´une composition décorative, ainsi que les thèmes caricaturaux et fantastiques de la presse et de l´illustration populaire du XIXe siècle, lesquels, à l´occasion, frôlent l´absurde (images de Rodolphe Töpffer, Grandville, George Cruikshank, Edward Lear  et même les illustrations de John Tenniel pour Alice à travers le miroir de Lewis Carroll), et que Gombrich définit dans sa totalité comme un mouvement de concentration depuis les marges de la culture (culture populaire) jusqu´au centre (art élevé)[96]. De cette manière, nous nous rallions au principe historique de Florian Ridari qui distingue le collage du XXe siècle de tous ses précédents possibles[97]; c´est-à-dire qu´il faudra commencer leur étude à partir du moment où tout le bagage ou capharnaüm populaire, artisanal, décoratif, industriel, etc., est introduit dans des oeuvres destinées à la consommation artistique, soit pour dissoudre le concept d´oeuvre isolée, comme cela s´est produit avec les avant-garde historiques, soit pour institutionnaliser des parties de la réalité dans des musées et des galeries. Cependant, nous ne sommes pas d´accord avec l´idée de Rodari qui veut que ce soit la méditation des artistes sur la pratique du collage ce qui distingue les manifestations précédentes des premiers papiers collés cubistes, car, à notre avis, c´est le moment historique dans le cadre duquel les premiers collages portèrent atteinte à la noblesse de la peinture, autant dans la galerie de Kahnweiler que dans l´exposition de la Section d´Or de 1912.

Le collage constitué ainsi comme phénomène historique suscitant –avec l´abstraction- le grand bouleversement dans l´art du XXe siècle, répond à une nouvelle situation de l´objet au-delà des frontières de l´art. Pour cette raison, la vision offerte généralement par l´historiographie et la critique de l´étrangeté des parties constitutives d´un collage, quel qu´en soit le niveau (iconographique, formel ou matériel), ne correspond pas à la réalité du geste constituant, puisque c´est la réalité celle qui se présente d´avance étrangère dans le cadre du marché, alors que celui qui pratique le collage essaiera d´attribuer de nouvelles fonctions aux objets privés de liberté qui cependant échappent aux moyens précédents de connaissance rationnelle et aux dispositions mimétiques ou narratives aristotéliques, L´issue que l´oeuvre artistique a choisi face à cette crise de la réalité consiste, en un premier moment, à fui sa propre condition artistique pour atteindre la cohérence entre sa forme et son contenu, entre sa forme et sa matière, parce que celle-ci est la seule voie de rendre reconnaissable la réalité enlevée: le collage et la production artistique contemporaine en général, ne pourra parler que de son propre processus d´élaboration, d´elle-même, et jamais de références qui lui sont étrangères pour être née de la scission de ses niveaux de compréhension, et avec nous faisons référence aux analyses iconographiques, linguistiques et formels menées à bien dans le but de leur récupération  institutionnelle et artistique. Au-delà de savoir s´il s´agit bien d´art, ce qui est décisif dans le collage c´est la reconstruction du temps vécu, la construction- ou la solidification du geste- de soi-même.













[1] Introduction de D. Bablet dans Denis Bablet (coord.), C. N. R. S., Collage et montage au théâtre et dans les autres arts durant les années vingt, La Cité – L’Âge d’Homme, Lausanne, p. 10.
[2] Ibíd., p. 20.
[3] Claude Amey et J. P. Olive (dir.), Fragment, montage-démontage, collage, décollage, la défection de l’oeuvre ?, Éd. L’Hamattan, coll. Arts & URF Arts, Philosophie et Esthétique – Université Paris 8, Paris, p. 9.
[4] Revue d’Esthétique 3/ 4, numéro spécial intitulé Collages et préparé par le Groupe m (Liège), 1978, U. G. E., coll. 10/ 18, Paris, 1978, p. 13.
[5] Ibíd., pp. 14-15.
[6] Henri Béhar, Littéruptures, L’Âge d’Homme, Lausanne, p. 187.
[7] Ibíd., p. 185
[8] Henri Béhar y Michel Carassou, Dada. Historia de una subversión, Península, Barcelona, 1996, p. 121.
[9] Revue d’Esthétique nº 3/ 4, numéro spécial intitulé Collages..., op. cit., p. 12.
[10] James Leggio (coord.), Picasso and Braque. A symposium, MoMA, New York, 1992, pp. 169-209 et 261-287.
[11] Benjamin H. D. Buchloh, “Pintura, índice, monocromo: Manzoni, Rayman, Moroni”, dans Benjamin H. D. Buchloh, Formalismo e historicidad. Modelos y métodos en el arte del siglo XX, Akal, Madrid, 2004, p. 237.
[12] Umberto Eco, La definición del arte, Destino, Barcelona, 2002.
[13] Du journalisme, Mallarmé regrette sa fonction de reportage consistant à “raconter, enseigner et même décrire”, laquelle aurait contaminé d´autres genres littéraires. Par contre, il s´approprie la typographie dans Un coup de dés dans un but métalinguistique: “un livre comme je ne les aime pas, ceux qui s´éparpillent et sont privés d´architecture. Décidément, aucun n´échappe au journalisme...L´excuse, dans tout ce hasard, c´est que l´assemblage ne s´appuie que sur une vertu commune, et qu´il faut toujours supprimer le début et la fin de ce que l´on écrit. Aucune introduction, aucune fin”, Stéphane Mallarmé, Fragmentos sobre el libro, Colegio Oficial de Aparejadores y Arquitectos Técnicos de la región de Murcia/ Consejería de Educación y  Cultura de la región de Murcia, La Caixa, Murcia, 2002, pp. 29 y 39. Voir aussi les p. 33 et 78-79. Mallarmé ne déprécie pas l´imprimerie mais le fait que le journalisme, conséquence de sa mécanique, n´ait légué aux autres genres qu´un désir représentatif qui nie l´autonomie, pas de la narration, même pas de la poésie, mais du  livre lui-même, principal objectif de sa carrière poétique.
[14] Hans Sedlmayr établit  le désir de faire de l´art comme étant l´une des conséquences de ce qu´il nomme “révolution de l´art moderne”. Hans Seldmayr, La revolución del arte moderno, Mondardori, Madrid, 1990, p. 121.
[15] G. W. F. Hegel, Introducción a la estética, Península, Barcelona, 1997, p. 16.
[16] G. W. F. Hegel, Lecciones sobre la estética, Mestas, Madrid, 2003, pp. 47-49.
[17] G. W. F. Hegel, Introducción a la estética, op. cit., p. 72.
[18] En ce qui concerne l´idéalisme subjectif de Kant, Hegel souligne: ”Mais même cette conciliation totale ou en apparence est, en fait, seulement subjective, c´est-à-dire, réalisées par le sujet, et n´existe qu´en vertu de son jugement; elle ne répond pas à la vérité et à la réalité en soi”, Ibíd., p. 111.
[19] “Cette philosophie de l´art comprend ... l´idée de ce qui est beau dans l´art, ou bien l´idéal considéré dans sa généralité”, G. W. F. Hegel, Lecciones sobre la estética, op. cit., pp. 43.
[20]Ibíd., pp. 51-52.
[21] G. W. F. Hegel, Estética I, Alta Fulla, Barcelona, 1988, p. 98.
[22] Juan Eduardo Cirlot, El mundo del objeto a la luz del surrealismo, op. cit., p. 79. En 1927, le futuriste italien, F. Azari lance un manifeste Pour une société de protection de la machine. Facsimil chez Ada Masoreo, “Il dominio della machina”, chez Universo mecánico. Il futurismo attorno a Balla, Depero, Prampolini, Mazzotta, Milano, 2003, pp. 87-88 (catálogo de exposición)
[23] Michel Foucault, Les mots et les choses, Gallimard, Paris, 1966, pp. 49-50.
[24] Ibíd., p. 309.
[25] Ibíd., p. 311.
[26] Ibíd., p. 312.
[27] Jean Clair, La responsabilidad del artista. Las vanguardias, entre el terror y la razón, Visor, Madrid, 1998, pp. 103-110.
[28] Ibíd., p. 296.
[29] G. W. F. Hegel, Introducción a la estética, op. cit., p. 111. Faisant une nouvelle référence à Kant, il ajoute : “dans cette analyse de la faculté de connaître l´objet, celle-ci n´existe si ce n´est en relation avec le sujet et avec le sentiment de plaisir ou avec celui de jouissance qu´il éprouve”, G. W. F. Hegel, Lecciones sobre la estética, op. cit., p. 39.
[30] Sur Mallarmé, Michel Foucault, Les mots et les choches, op. cit., pp. 316-317.
[31] Denys Riout, La peinture monochrome. Histoire et archéologie d’un genre, Jacqueline Chambon, Nîmes, 1996, pp. 126-127.
[32] Florence de Mèredieu, Histoire matérielle et immatérielle de l’art moderne, Larousse, Paris, 2004 (1ª éd.  1994), p. 660. Elle y commente le manque d´études historiques sur les matières employées dans l´art et la suprématie de l´histoire des formes. Elle ne cite comme précédent que l´oeuvre de Gottfried Semper, Le style dans les arts techniques et architechtoniques, 1861-1863, chez Florence de Mèredieu, Ibíd. pp. 39-40. 
[33] Max Ernst, Escrituras, Poligrafa, Barcelona, 1982, pp. 200-201.
[34] Florence de Mèredieu, Histoire matérielle et immatérielle de l’art moderne, op. cit., pp. 238-239. 
[35] Isidore Isou, De l’impressionisme au lettrisme. L’évolution des moyens de réalisation de la peinture moderne, Filipacchi, Paris, 1974, p. 9.
[36] Véase Ibíd., pp. 78-79.
[37] Florence de Mèredieu, Histoire matérielle et immatérielle de l’art moderne, op. cit., pp. 663 y 665.
[38] Dépaysement qui, pour Hegel, est l´origine de la culture. Voir G. W. F. Hegel, La fenomenología del espíritu, Fondo de Cultura Económica de España, Madrid, 2000, p. 290.
[39] G. W. F. Hegel, Estética II, Alta Fulla, Barcelona, 1988, p. 213. 
[40] G. W. F. Hegel, Introducción a la estética, op. cit., p. 153.
[41] Julia Kristeva, Semiótica I, Fundamentos, Madrid, 2001, pp. 151-155.
[42] De la même manière que pour Hegel la dialectique est la science du développement d´une conscience et que, pour Marx, c´est la science du mouvement de la matière déterminée par l´histoire, Henri Pastoureau, “De Hegel à Lénine”, en Henri Pastoureau, Ma vie surréaliste, Maurice Nadeau, Paris, 1992, p. 462. Dans l´inversion de l´idéalisme de Hegel par Marx, la matière en vient à précéder l´idée, passant celle-ci à la pensée, Karl Marx, « Epílogo a la segunda edición alemana de El Capital” (1873), Karl Marx, El Capital. Libro I. Tomo I, Akal, Madrid, 2000, pp. 29-30.
[43] Karl Marx, El Capital. Libro I. Tomo I, Ibíd., p. 58.
[44] La transcendance de cette aliénation historique de l´homme peut se déduire de ces paroles de Francastel: “les actions et les objets figuratifs permettent à l´homme, suivant des plans différents, de traduire ses sensations en les matérialisant suivant un ordre déterminé et modifiable”. Pierre Francastel, Art et technique aux XIX et XX siècles, Gallimard, Paris, 2000, p. 117-118. Étant séparé des objets et de ses propres actes dans la production, l´homme ne peut matérialiser son intérieur.
[45] Francastel ajoute à la nouvelle conception des objets industriels, l´abondance des matériaux inédits avec lesquels on les fabrique et qui viennent s´ajouter à l´étrangeté. Pierre Francastel, Art et technique aux XIX et XX siècles, op. cit., p. 77.
[46] Marx le compare aux pulsions nerveuses optiques qui sont perçues par chacun comme si c´était la nature extérieure en soi. Karl Marx, El Capital. Libro I. Tomo I, op. cit., pp. 102-103.
[47] Ibíd., p. 105.
[48] Ibíd., p. 116.
[49] François Monnin, Le collage. Art du vingtième siècle, op. cit., p. 137.
[50] Florence de Mèredieu, Histoire matérielle et inmatérielle de l’art moderne, op. cit., pp. 29-33. 
[51] Pierre Daix, Historia cultural del mundo moderno, op. cit., pp. 13-23.
[52] Pour cet auteur, les deux courants opposés de l´art contemporain sont, d´un côté, une tendance à convertir l´objectivité et l´ordre mécanique en un thème artistique –cubistes et constructivistes- et, d´un autre côté, une recherche du langage de l´enfance et de tout ce qui est primitif et représente un retour aux origines, Lewis Mumford, Arte y técnica, Nueva Visión, Buenos Aires, 1968, pp. 57-58. Ces deux courants sont, d´après lui, opposés, tandis que pour nous, ils sont absolument imbriqués. Par exemple, le surréalisme ne peut être séparé du primitivisme, ni de la poésie mécanique de l´automatisme.
[53] Octavio Paz, La otra voz. Poesía y fin de siglo, Seix Barral, Barcelona, 1990, pp. 43-49, ouvrage dans lequel il met en relation l´intérêt pour l´essor du voyage dans la poésie moderne et la nécessité de chercher des alternatives à la beauté occidentale avant  la perte de la notion du temps, conséquence du simultanéisme moderne et de la remise en question des principes fondamentaux de l´espace et du temps.
[54] “... l´apparition du chemin de fer, le bateau à vapeur et le télégraphe, sans parler de l´armement qu´ont facilité les conquêtes coloniales des puissances occidentales et qui ont mis l´homme blanc en contact avec les régions les plus éloignées du globe. Les expositions ne furent pas non plus les seules nouvelles sources d´information sur les produits et monuments de terres lointaines. L´invention  récente de la photographie s´est mise au service d´entreprises aussi ambitieuses que l´était l´exploration archéologique de l´Inde, et, à partir de la moitié du XIXe siècle, de plus en plus de livres avec des gravures photographiques sont apparus sur le marché”, E. H. Gombrich, La preferencia por lo primitivo. Episodios de la historia del gusto y el arte de occidente, Debate, Barcelona, 2003, pp. 196-199. Cet historien fait aussi coïncider l´industrie avec l´essor du primitivisme: “La signification du concept de ce qui est primitif dérive de l´idée de progrès” (p. 235). Cependant, cette convergence se produit par la négation: on définit ce qui est primitif par opposition au degré de développement atteint en Occident par la Révolution Industriele.
[55] De fait, le collectionneur d´objets qui personnifie si bien la situation de l´individu dans le contexte capitaliste, ne distingue pas les objets naturels des artificiels, ni les usages auxquels ils étaient destinés ou encore s´ils sont le fruit d´une certaine technologie. Maurice Rheims, La vie étrange des objets. Histoire de la curiosité, Librairie Plon, Paris, 1959, pp. 73-74.
[56] Claude Lévi-Strauss, El pensamiento salvaje, op. cit., p. 60. Francastel croit que ce sont les historiens et les spécialistes des sociétés primitives ceux qui ont le plus de choses à dire quant à la nature esthétique des objets artistiques, Pierre Francastel, Art et technique aux XIX et XX siècles, op. cit., pp. 111-112.
[57] Picasso nia qu´il ait imité formellement l´art nègre qui se trouve au Musée du Trocadéro de Paris, ce qui peut être une réaction contre les interprétations de bon nombre de critiques et d´historiens qui voulurent voir dans cet art, l´origine du cubisme. Dans l´entretien avec Malraux intitulé Tête d´obsidienne, Paris, 1974, cité entre autres par E. H. Gombrich, op. cit., pp. 217-218. Cependant, il accepte d´autres influences considérées “primitives”, tels que l´art ibère ou égyptien.
[58] Une vision de l´époque  de l´art primitif, nous est offerte par l´enquête pour le Bulletin de la Vie Artistique, réalisée par Félix Fénéon en 1920 auprès de plusieurs ethnographes, explorateurs, artistes, collectionneurs et  galeries, à l´occasion de l´ouverture d´une salle du Louvre consacrée à ces arts. Félix Fénéon, Iront-ils au Louvre. Enquête sur des arts lointains, Toguna, Toulouse, 2000. Francastel cite Lévi- Strauss pour démontrer que toute société différente de la nôtre constitue par elle-même un objet. Pierre Francastel, Art et technique aux XIX et XX siècles, op. cit., p. 109.
[59] Carl Einstein, La escultura negra y otros escritos, Gustavo Gili, Barcelona, 2002, p. 36. C´est à ce moment-là que l´objet exotique cesse d´être considéré comme bizarre et devient référence pour de possibles alternatives à ce qui était jusqu´alors considéré beau, ce qui apporte une solution au problème de la perte du principe de réalité. Octavio Paz, La otra voz…, op. cit., pp. 40-47. À partir de là, on se demande si l´oeuvre d´art “primitive” est véritablement une oeuvre d´art parce qu´à l´origine elle ne fut pas destinée à l´observation mais qu´on lui attribua des pouvoirs magiques dont le but étaient de réconcilier l´homme avec l´Univers entier. L´oeuvre d´art destinée à la visualisation provient en réalité de la révolution perspectiviste de la Renaissance, et arrive au XIXe siècle vide de contenus symboliques; elle ne représente plus la maîtrise rationnelle de l´homme. La présence des objets isolés sur le marché a démoli leurs principes humanistes, de même que, -surtout avec le surréalisme (il en fut de même lorsque les futuristes s´autoproclamèrent “primitifs modernes”)-,  la connaissance de ces objets magiques et la magie même redeviendront le moyen de connaissance le plus approprié pour la communion de l´objet avec le sujet, reconciliation qu´Octavio Paz, dans sa référence à l´art magique, qualifie avec justesse d´ “électrique”. Il s´agit du moment où l´objet magique nous invite à ne plus être nous-mêmes et à être autre, prétention que possède aussi l´objet de consommation lorsque n´importe quoi parvient à être magique en fonction de sa relation avec le possesseur, parce que la magie ne réside pas dans l´objet en soi, mais dans la rencontre avec le sujet (lire les réponses d´Octavio Paz au questionnaire d’André Breton, L’art magique, Phébus, Paris, 1991, pp. 310-312. En espagnol, Octavio Paz, La búsqueda del comienzo (escritos sobre el surrealismo), Fundamentos, Madrid, 1983, pp. 47-54.
[60] L´étude de ce processus est l´une des tâches des historiens selon Pierre Francastel, Art et technique aux XIX et XX siècles, op. cit., pp. 99 y 103.
Lors d´une conférence prononcée auprès des membres de l´Association de la Fédération Démocratique de Hammersmith à Kelmscott House, le 30 novembre 1884, William Morris considérait complète la conquête de la nature et réclamait l´organisation de la vie de l´homme –gouverneur des forces naturelles- comme  principal objectif du moment. Dans “Comment nous vivons et comment nous pourrions vivre”, William Morris, Cómo vivimos y cómo podríamos vivir. Trabajo útil o esfuerzo inútil. El arte bajo la plutocracia, Pepitas de calabaza, Logroño, 2004, p. 64 (cette conférence fut publiée pour la première fois en  1887, dans Commonweal). Octavio Paz coïncide également avec cette idée que l´histoire de l´homme consiste en sa propre aliénation au profit de ses mythifications que la modernité lui a refusées. Octavio Paz, La búsqueda del comienzo…, op. cit., p. 51.
[61] « Simultanément, il ne s’agit plus de rechercher une conciliation entre les produits de l’activité mécanique de la société et les arts, mais de définir les conditions nécessaires de l’art nouveau dans une civilisation où les produits de la machine constitueront en quelque manière un milieu naturel ». Pierre Francastel, Art et technique aux XIX et XX siècles, op. cit., p. 48. Mumford croit que la raison pour laquelle l´homme actuel accepte l´ordre impersonnel, la régulation, les répétitions et la standarisation radicale qu´impose l´industrie, c´est sa capacité à accepter sans se leurrer les matériaux donnés naturellement par les forces de l´environnement depuis ses origines. Lewis Mumford, Arte y técnica, op. cit., p. 49.
[62] Il est curieux d´observer comment  même Octavio Paz – spécialiste de masques (Octavio Paz, El laberinto de la soledad, Cátedra, Madrid, 2004, pp. 164-181)- confond, quand il parle de surréalisme, la fonctionnalité avec les valeurs du marché. Octavio Paz, La búsqueda del comienzo (escritos sobre el surrealismo), Fundamentos, Madrid, 1983, pp. 32-33
[63] Paz commente comment au XXe siècle, la réalité s´est soudain évanouie et s´est désagrégée, Octavio Paz, La otra voz…, op. cit., p. 40. Ce fait s´attribue à l´industrialisation, aux sciences relatives, à la perte de prestige de la raison et à la mort de Dieu annoncée avant Nietzsche, par Max Stiner et par Jean Paul Richter dans Alba del Nihilismo, Istmo, Madrid, 2005, pp. 21-37. À partir de cette perte de la réalité, les notions de temps et d´espace se perdent, ce qui a entraîné la ferveur pour le voyage à la recherche de nouveaux espaces alternatifs, et la connaissance des objets exotiques. Nous avons des exemples littéraires dans la locomotive de Whitman, dans Orient-Express de Valéry Larbaud, La prose du Transsibérien de Cendrars, l´automobile et l´aéroplane futuristes, etc.
[64] Selon Francastel, l´art moderne ne se limite pas à la production de formes nouvelles et provocantes, mais il se fonde sur l´activité globale de l´homme contemporain et sur ses expériences. Pierre Francastel, Art et technique aux XIX et XX siècles, op. cit., p. 108. L´art n´est plus un moyen de connaissance comme il le fut à la Renaissance selon Jean Clair, La responsabilidad del artista…, op. cit. L´unité qui régit les différentes facettes du savoir a succombé à la fragmentation de la production et a été substituée par les lois du marché. Plus que jamais, il incombe à l´art  la responsabilité de réconcilier le sujet avec son environnement aux dépens de son autonomie aurique qu´il atteignit avec la Renaissance. 
[65] “Jouir de la foule est un art; et celui-là seul peut faire, aux dépens du genre humain, une ribote de vitalité, a qui une fée a insufflé dans son berceau le goût du travestissement et du masque, la haine du domicile et la passion du voyage/ Multitude, solitude: termes égaux et convertibles pour le poète actif et fécond. Qui ne sait pas peupler sa solitude ne sait pas non plus être seul dans une foule affairée”. Charles Baudelaire, Le Spleen de Paris. La Fanfarlo, Flammarion, Paris, 1987, p. 94.
[66] Walter Benjamin, Poesía y capitalismo. Iluminaciones IIop. cit., p. 71.
[67] Erich Fromm, Del tener al ser, Paidós, Barcelona, 2000, pp. 119-120. Plus tard, cet auteur différencie la propriété fonctionnelle de la mort et non fonctionnelle, étant la fonctionnelle compatible avec l´annulation marxiste de la propriété privée (pp. 125-132)
[68] K. Marx y F. Engels, El manifiesto comunista, Endimión, Madrid, 1987, p. 61, et Federico Engels, El origen de la familia. La propiedad privada y el estado, Fundamentos, Madrid, 1996, p. 219.
[69] “Tout à l’heure, comme je traversais le boulevard, en grande hâte, et que je sautillais dans la boue, à travers ce chaos mouvant où la mort arrive au galop de tous les côtés à la fois, mon auréole, dans un mouvement brusque, a glissé de ma tète dans la fange du macadam. Je n´ai pas eu le courage de la ramasser”. Charles Baudelaire, “Perte d’auréole”, dans Le  Spleen de Paris. La Fanfarlo, op. cit., p. 173. 
La critique que ce poète français adresse à la photographie est compréhensible à partir du moment où celle-ci sert de modèle à la peinture, s´écartant ainsi de son véritable objectif –la beauté- et se concentre uniquement sur l´imitation de la réalité. Ce sentiment est très proche de la conception de l´aura présentée par la suite, par Walter Benjamin. Cette représentation technique et mécanique de la réalité comporte la perte de l´imaginaire et de l´impalpable pour remplacer la mémoire dans sa fonction. Charles Baudelaire, Salones y otros escritos sobre arte, A. Machado Libros, Madrid, 2005, pp. 229-233.
[70] Walter Benjamin, Poesía y capitalismo. Iluminaciones II, op. cit., p. 61. Octavio Paz établit clairement cette nouvelle situation du poète dans la modernité: “Dans un monde de boîteux, celui qui dit qu´il y a des êtres avec deux jambes est un visionnaire, un homme qui s´évade de la réalité. En réduisant le monde aux données de la conscience, et toutes les oeuvres à la valeur travail-marchandise, on expulsa automatiquement de la sphère de la réalité le poète et son oeuvre”. Octavio Paz, La búsqueda del comienzo (escritos sobre el surrealismo), Fundamentos, Madrid, 1983, p. 80. 
[71] Walter Benjamin, Poesía y capitalismo. Iluminaciones II, op. cit., p. 77.
[72] Charles Baudelaire, El spleen de  París, op. cit., pp. 39-40. 
[73] Cette maxime définit l´affaire interne de la peinture, celui qui lui est propre. Par contre, le contenu philosophique et moral, c´est la préoccupation extérieure de l´art depuis le moment où il entre en compétition  avec le livre. En Charles Baudelaire, “El arte filosófico” (h. 1859), dans Charles Baudelaire, Salones y otros escritos sobre arte, op. cit., p. 399. Sartre extrait la dialectique sujet-objet de son oeuvre poétique, d´où il déduit son constant narcissisme. J. P. Sartre, Baudelaire, Gallimard, Paris, 1947, pp. 26-28.
[74] Arthur Rimbaud, “Délires II. Alchimie du verbe”, Arthur Rimbaud, Poésies. Une saison en enfer. Illuminations, Gallimard, Paris, 1999, p. 192. Hugnet établit une relation entre cette Alchimie du verbe de Rimbaud et le collage, Georges hugnet, “Collage et montage”, Dictionnaire du Dadaïsme, 1916-1922, Éditions Jean-Claude Simoën, Paris, 1976. Dans Georges Hugnet, Collages, Léo Scheer, Paris, 2003, p. 11.
[75] Cet auteur attribue à Rimbaud, et non à Baudelaire, le fait d´avoir abandonner la poèsie classique qui dépend qualitativement de la prose. Roland Barthes, Le degré zéro de l’écriture, op. cit., pp. 33-34.
[76] Pere Gimferrer, Rimbaud y nosotros, Publicaciones de la Residencia de Estudiantes, Madrid, 2005, pp. 25-28. L´écrivain d´avant-garde roumain Benjamin Fondaine établit une relation entre Rimbaud et sa Lettre à la voyante, et le hasard dadaïste, une nécessité des choses créées en dehors d´elles-mêmes. Benjamin Fondaine “Signification de Dada”, texte inédit et sans date, et recueilli dans Petre Raileanu et Pierre Carassou, Fundoianu/ Fondaine et l’avant-garde, Fondation Culturelle Roumaine, Bucarest/ Paris-Méditérranée, Paris, 1999, p. 80.
[77] “L´artiste est la synthèse de ce qui est théorique et de ce qui est pratique”, Novalis, La Enciclopedia (notas y fragmentos), Fundamentos, Madrid, 1974, p. 20. Ces écrits datent d´entre 1795 y 1800.
[78] Il n´existe pas d´ordre ni de désordre où il n´y a pas une idée pareille qui exerce une influence sur l´énumération et la division des objets”, Novalis, Ibíd., p. 14.
[79] Arthur Rimbaud, op. cit., p. 84.
[80] Marcel Jean y Arpad Mezei, Genèse de la pensée moderne dans la littérature française, op. cit., pp. 127 y 133. Nous comptons aussi avec le jugement de Marcel Raymond sur son oeuvre: “Rimbaud signale, donc, au poète la tâche <<d´être voyant>>, c´est-à-dire, de réveiller dans son esprit les facultés endormies qui le mettront en contact avec le réel du quotidien”, Marcel Raymond, De Baudelaire al surrealismo, op. cit., p. 32.
[81] Marcel Jean y Arpad Mezei, Genèse de la pensée moderne dans la littérature française, op. cit., p. 34.                
[82] Comte de Lautréamont (Isidore Ducasse), Cantos de Maldoror, Visor, Madrid, 1997, p. 227.
[83] Alfred Jarry, Gestes et opinions du docteur Faustroll, pataphysicien, Gallimard, Paris, 1980, pp. 38-39
[84] R. Shattuck, La época de los banquetes, op. cit., p. 245. Novalis avait déjà identifié le romantisme avec l´art de la surprise, Novalis, La Enciclopedia…, op. cit., p. 347.
[85] Max Ernst cite dans Au-delà dela peinture (1936), pour parler du collage, L´alchimie du verbe de Une Saison en Enfer de Rimbaud. Il a également recours à la rencontre fortuite de Lautréamont. Max Ernst, Escrituras, op. cit., pp. 198-199. Werner Spies, Max Ernst. Les collages, op. cit., p. 53, prévient que ces précédents littéraires n´apportent pas une technique déterminée qu´Ernst applique à la peinture, mais une analogie qui pour nous construit un esprit nouveau défini par l´acte de juxtaposer, comme le fit Roger Shattuck.
[86] Novalis assure que l´objet de la poésie ne se trouve pas dans la poésie même mais dans le merveilleux. Il ajoute que le poète tente d´invoquer le hasard, Novalis, op. cit., pp. 339 y 355.
[87] G. W. F. Hegel, Estética I, op. cit., p. 278.
[88] “Dans une société communiste, il n´y a pas de peintres, mais, tout au plus, des hommes, qui, entre autres choses, peignent”. Cette citation appartient à son Die deutche ideologie recueillie par K. Marx et F. Engels, Escritos sobre arte, selección, prólogo y notas de Carlo Salinari, Península, Barcelona, 1969, p. 197. Dans cette même page, Marx établit une relation entre l´origine de l´artiste et la division du travail. Arthur Schwarz trouve un parallélisme évident entre cette affirmation  et les ready-made “anartistiques” de Duchamp, Arthur Schwarz, The Complete Works of Marcel Duchamp, Delano Greenidge, New York, 2000, p. 42, ce qui rejoint la maxime prophétique lancée par Apollinaire à propos de Duchamp en 1913: “il est peut-être du ressort d´un artiste si peu préoccupé par l´esthétique et si préoccupé par l´énergie comme l´est Marcel Duchamp, de réconcilier l´art et le peuple”, Guillaume Apollinaire, Meditaciones estéticas…”, op. cit., p. 79.
[89] Novalis, op. cit., p. 330-331, où ,d´autre part, il affirme: “Le poète a besoin des choses et des mots comme des touches, et toute la poésie s´appuie sur d´actives associations d´idées”.
[90] G. W. F. Hegel, Introducción a la estética, op. cit., pp. 58-59.
[91] Ibíd., p. 45.
[92] “L´art est le complément de la nature/ L´art est la nature complémentaire”, Novalis, op. cit., p. 348.
[93] “Les philosophes se sont contentés d´interpréter le monde de différentes façons; en fait, il s´agit de le transformer”, onzième thèse de Thèse sur Feuerbach, manuscrit de 1845, cité par Jaime Brihuega, “Arte y sociedad. Genealogía de un parámetro fundamental”, en Valeriano Bozal (ed.), Historia de las ideas estéticas y de las teorías artísticas contemporáneas. Volumen II, Visor, Madrid, 1996, p. 115. N´essayons pas de voir dans l´avant-garde une continuation des théories marxistes, plutôt un dépassement car, lorsque naquit le nouvel art, la société pouvait déjà prendre connaissance de la fonction correctrice qu´eut Le Capital à la fin du XIXe siècle et début du XXe, en se rendant compte des dangers de la concentration des gains (Octavio Paz, La otra voz. Poesía y fin de siglo, Seix Barral, Barcelona, 1990, p. 38). En réalité, peu nombreux sont les mouvements d´avant-garde qui se sont inspirés directement du marxisme, et quelques uns s´y sont opposés carrément. La volonté de transformation révolutionnaire de l´avant-garde historique ne coïncide pas avec les conséquences réelles de la IIe Internationale. Notre intention est d´observer comment Le Capital de Marx et l´art d´avant-garde sont les résultats d´une nouvelle situation de l´objet propicié par la Révolution Industrielle, qui donne lieu à un nouveau marché qui finira par dominer l´industrie elle-même.
[94] Le concept de bricoleur de Lévi-Strauss se trouve dans Claude Lévi-Strauss, El pensamiento salvaje, Fondo de Cultura Económica, 1988, pp. 62-63, où il établit une corrélation entre langage et technologie en prenant la pensée des restes psychologiques et historiques pour une formation mythologique et totémique, ainsi que le bricoleur  prend des fragments qui sont restés en dehors du “discours” technologique. L´auteur signale aussi le caractère nécessaire et à posteriori de cette transaction et de ce prêt.
[95] Autant la problématique de l´industrie que celle de l´art se trouvent entre la pensée et l´action, c´est-à-dire, la pensée et sa matérialisation, entre l´homme et sa relation avec son environnement. La Révolution Industrielle ne sera surmontée, d´après les théories de Lewis Mumford, qu´à travers la reconciliation de l´homme avec ses activités et la conséquente libération de l´esprit, lequel finira par dominer le monde. Pierre Francastel, Art et technique aux XIX et XX siècles, op. cit., pp. 39, 47 y 65.   
[96] E. H. Gombrich, La preferencia por lo primitivo..., op. cit., p. 259.
[97] Florian Rodari, Le collage..., op. cit., p. 21